Que faire en cas d’abandon de chantier ? 

Vous avez engagé des travaux de construction ou de rénovation, mais le chantier est à l’arrêt depuis plusieurs semaines ? L’entrepreneur ne donne plus signe de vie, les échéances s’accumulent et les délais sont dépassés ? Vous faites peut-être face à un abandon de chantier.

Dans cette situation, les conséquences peuvent être lourdes : retards de livraison, surcoûts, préjudices matériels… Il est alors essentiel d’agir rapidement et de manière structurée pour faire valoir vos droits. Mais par où commencer ? Et surtout, comment s’assurer que les démarches entreprises soient juridiquement efficaces ?

Le cabinet AKP, cabinet d’avocat en droit de la construction, vous explique, étape par étape, comment réagir face à un abandon de chantier.

Qu’est-ce qu’un abandon de chantier ?

Un abandon de chantier se caractérise par l’interruption injustifiée des travaux pendant un certain temps, sans information ni justification valable de la part de l’entreprise ou de l’artisan. Cette interruption peut être constatée alors même que les travaux sont loin d’être terminés, ou parfois même avant leur commencement effectif.

Bon à savoir : 

L’abandon de chantier peut concerner aussi bien un contrat de construction de maison individuelle (CCMI), qu’un marché privé ou un contrat avec un artisan. Les règles applicables peuvent toutefois varier selon la nature du contrat signé.

La qualification juridique de l’abandon de chantier suppose :

 

    • l’existence d’un contrat de travaux en cours d’exécution ;

 

    • une interruption injustifiée ou abusive des travaux ;

 

    • l’absence de reprise des travaux malgré relances ou rappels.

En cas de doute, et pour vous assurer, avant d’entreprendre des démarches, que vous êtes bien en présence d’un abandon de chantier, adressez-vous à un avocat en droit de la construction, qui saura analyser la situation. 

Quelles étapes suivre en cas d’abandon de chantier ? 

Face à un abandon de chantier, relancer oralement l’entreprise est généralement le premier réflexe. Mais il n’est pas suffisant. Face à cette situation, il est essentiel de poser des actes juridiques clairs et de respecter certaines étapes.

Étape 1 : Faire constater l’abandon de chantier

Avant toute démarche, il est indispensable de réunir des preuves de l’abandon de chantier :

 

    • constat de commissaire de justice (ex-huissier de justice) ;

 

    • photos datées ;

 

    • témoignages ;

 

    • mails ou lettres restés sans réponse.

☝︎ Le saviez-vous ?

Un expert en bâtiment peut intervenir de deux manières : désigné amiablement par le maître d’ouvrage (sur devis accepté) pour dresser un état des lieux avant tout contentieux, ou nommé par le juge des référés lorsque le désaccord persiste. Dans les deux cas, son rapport technique – avancement réel, malfaçons, coût prévisionnel des reprises – constitue une pièce maîtresse pour mobiliser la responsabilité civile (RC) de l’entreprise et chiffrer précisément votre préjudice.

Étape 2 : Envoyer une mise en demeure formelle

Une fois les preuves réunies, il convient d’adresser à l’entreprise une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception. Elle doit :

 

    • rappeler les obligations contractuelles de l’entreprise ;

 

    • constater l’arrêt injustifié du chantier ;

 

    • fixer un délai raisonnable pour la reprise des travaux (généralement 8 à 15 jours).

Une mise en demeure bien rédigée produit un double effet décisif :

 

    • Signal d’alarme : datée et envoyée par LRAR, elle rappelle officiellement à l’entreprise que sa responsabilité contractuelle et sa responsabilité civile professionnelle sont susceptibles d’être engagées. La menace crédible d’une action en justice incite souvent l’entrepreneur à reprendre immédiatement les travaux pour limiter ses risques.

 

    • Force probatoire : la mise en demeure fixe officiellement la date d’inexécution et détaille les manquements. En cas de contentieux, elle devient une pièce maîtresse pour prouver votre diligence, justifier la résolution du contrat, réclamer des pénalités de retard ou chiffrer vos dommages‑intérêts.

La mise en demeure peut accélérer la reprise du chantier et sécuriser votre dossier si une procédure judiciaire s’avère nécessaire. Pour garantir son efficacité, vous pouvez confier cette mission à un avocat qui vérifiera chaque mention obligatoire et se chargera, le cas échéant, de son envoi en bonne et due forme.

Étape 3 : Comparatif : les bons réflexes à adopter

En cas d’abandon de chantier, la vigilance est de mise ! En effet, certaines actions permettent de sécuriser votre dossier et d’autres, au contraire, risquent de compromettre vos recours.

À faire À éviter
Faire constater l’abandon par un commissaire de justice ou un expert Laisser passer plusieurs semaines sans réagir
Envoyer une mise en demeure en LRAR à l’entreprise concernée Payer les travaux non réalisés ou non vérifiés
Rassembler les preuves : photos, devis, factures, échanges écrits Tenter une reprise des travaux sans résilier le contrat initial
Faire appel à un avocat pour analyser le contrat et engager les démarches Ignorer les clauses du contrat ou agir sans conseil juridique
Vérifier les assurances mobilisables (DO, RC décennale, etc.) Négliger l’étape de la preuve ou s’en tenir à des témoignages oraux

Face à un abandon de chantier, il existe trois leviers déterminants : la preuve, la mise en demeure et l’accompagnement juridique. Suivre cette checklist augmente nettement les chances de voir l’entreprise reprendre le chantier ou, à défaut, d’obtenir rapidement une compensation par voie judiciaire ou assurantielle.

Quels recours en cas d’abandon de chantier ?

Si l’entreprise ne donne pas suite à la mise en demeure, plusieurs voies de recours s’offrent au maître d’ouvrage.

La résolution judiciaire du contrat

Lorsque l’entreprise ne reprend pas les travaux et que les manquements sont avérés, il est possible de demander au tribunal la résolution judiciaire du contrat aux torts exclusifs de l’entrepreneur. Fondée sur l’article 1224 du Code civil, cette mesure anéantit rétroactivement le contrat : l’entreprise perd tout droit à rémunération pour les ouvrages non conformes ou inachevés.

Dans l’assignation, plusieurs chefs de demande sont habituellement formulés :

 

    • résiliation aux torts de l’entreprise avec mention de la date d’abandon ;

 

    • restitution des acomptes déjà versés pour des prestations non exécutées ;

 

    • condamnation à des dommages‑intérêts couvrant, notamment, le surcoût de reprise, les frais de relogement, la perte de jouissance et les honoraires d’expertise ;

    • le cas échéant, astreinte financière destinée à contraindre l’entreprise à libérer le chantier, remettre les clés et les documents techniques, ou exécuter toute obligation résiduelle, tant qu’elle ne s’est pas conformée à la décision judiciaire.

 

Cette action « au fond » est engagée sur la base de pièces solides : constat d’abandon, mise en demeure restée infructueuse, devis de reprise, éventuel rapport d’expertise, etc. 

Conformément à l’article 2224 du Code civil, l’action en responsabilité contractuelle se prescrit par cinq ans à compter du jour où le maître d’ouvrage a connu ou aurait dû connaître la situation d’abandon.

Une assignation introductive d’instance, même formée à titre conservatoire, interrompt ce délai, quand bien même le montant exact du préjudice n’est pas encore déterminé.

Au‑delà de 10 000 € de demandes, la représentation par avocat est obligatoire devant le tribunal judiciaire.

Bon à savoir : 

Si l’entreprise est placée en liquidation judiciaire, il faut déclarer votre créance (acompte versé, coût de reprise, pénalités de retard, etc.) dans un délai de 2 mois à compter de la publication au BODACC.
Un avocat peut se charger de cette formalité, suivre la procédure collective et encadrer la reprise du chantier par une nouvelle entreprise dans des conditions juridiquement sécurisées.

L’action en référé

Lorsque l’entreprise ne réagit pas à la mise en demeure et qu’il y a urgence à sécuriser le chantier ou à préserver les preuves, il est possible de saisir le juge des référés, c’est-à-dire la formation d’urgence du tribunal judiciaire.

L’objectif est d’obtenir une décision rapide (2 à 6 semaines en pratique) sans attendre le jugement complet au fond : 

 

    • le juge des référés peut constater l’abandon : cette mention officielle fige la date d’inexécution et sert de fondement à la résolution du contrat ; 

 

    • il peut désigner un expert judiciaire chargé de mesurer l’avancement réel du chantier, de chiffrer les travaux qu’il reste à réaliser et d’estimer le coût des reprises ; 

 

    • si le site présente un risque (fuite, effondrement, intrusion, etc.), il est possible d’obtenir des mesures conservatoires – bâchage, étaiement, sécurisation – assorties d’une astreinte financière pour contraindre l’entreprise à s’exécuter ;

 

    • le juge peut allouer une provision, c’est‑à‑dire une avance sur les dommages‑intérêts, afin de financer sans délai la reprise du chantier par un tiers.

 

Pour que l’action en référé soit recevable, deux conditions doivent être réunies : 

 

    • l’urgence (risque de dégradation du bâti, impératif de calendrier, danger pour la sécurité, etc.) ;

 

    • l’absence de contestation sérieuse (abandon prouvé par photos, mails restés sans réponse, constat ou mise en demeure…).

Bon à savoir : 

L’ordonnance de référé est exécutoire à titre provisoire : cela signifie que l’entreprise peut interjeter appel de la décision, mais qu’elle doit néanmoins exécuter immédiatement les mesures ordonnées (expertise, provision et éventuelles mesures conservatoires).

Quelles assurances construction mettre en œuvre en cas d’abandon de chantier ?

Lorsque l’entreprise ne reprend pas les travaux, l’activation des garanties d’assurance est la clé pour financer les reprises ou indemniser le préjudice. C’est d’ailleurs l’un des points forts du dispositif français – véritable filet de sécurité pour le maître d’ouvrage.

L’abandon de chantier peut générer deux grands types de préjudice :

 

    • Le préjudice d’inachèvement : surcoûts pour faire terminer l’ouvrage, éventuels frais de relogement ou de garde‑meubles, perte de jouissance du bien ;

 

    • Le préjudice lié aux malfaçons ou aux désordres constatés : coût des reprises, perte de valeur, risques de sinistres futurs.

 

Avant d’envisager une action contre l’entreprise défaillante, il est donc stratégique d’examiner les assurances construction qui peuvent prendre le relais – directement ou en complément de la procédure judiciaire.

Garantie mobilisable Quand intervient‑elle ? Ce qu’elle peut financer dans le contexte d’un abandon Points de vigilance / délais
Garantie de livraison (CCMI) Lorsque le contrat est un CCMI et que le constructeur ne termine pas la maison Paiement du surcoût pour faire finir le chantier par un tiers Remboursement des acomptes versés Saisine rapide du garant (idéalement avant 15 jours) après mise en demeure restée sans effet
Assurance dommages‑ouvrage (DO) Après réception de l’ouvrage, si des désordres de nature décennale apparaissent Préfinance la réparation des désordres structurels révélés après l’abandon (fissures, infiltrations, impropriété à la destination…) Ne finance pas l’achèvement pur et simple ; déclaration sous 5 jours ouvrés après constat du sinistre
RC professionnelle Pendant l’exécution des travaux, pour les fautes professionnelles (malfaçons non décennales, retards, dommages intermédiaires) Dommages matériels et immatériels consécutifs au manquement contractuel (surcoût de reprise, préjudice de jouissance) Mobilisable avant réception ; déclaration auprès de l’assureur de l’entreprise défaillante ; prescription quinquennale pour l’action directe contre l’assureur

Pourquoi la garantie décennale n’est généralement pas mobilisable ?

La garantie décennale des constructeurs ne s’ouvre qu’après réception (expresse, tacite ou judiciaire) de l’ouvrage. Or, un abandon de chantier intervient justement avant cette étape clé : les travaux ne sont ni achevés, ni réceptionnés. Tant qu’aucune réception n’est intervenue, la garantie décennale reste donc inapplicable. Il faut privilégier :

 

    • la garantie de livraison (si contrat CCMI) pour achever le chantier ;

 

    • la responsabilité civile professionnelle de l’entreprise pour les malfaçons ou retards ;

 

    • ou une action judiciaire qui vise d’abord l’achèvement/reprise, puis, le cas échéant, une réception judiciaire partielle ouvrant la décennale.

☝︎ Le saviez‑vous ? 

Si vous avez souscrit un prêt affecté aux travaux, vous pouvez demander au juge, sur le fondement de l’article L312‑55 du Code de la consommation, la suspension provisoire de vos échéances pendant la durée de la procédure (jusqu’à deux ans maximum, sans frais ni pénalités).

Quel est le rôle de l’avocat en assurance construction ?

L’assistance d’un avocat en assurance construction, constitue un véritable atout pour :

 

    • analyser la situation et déterminer si elle constitue un abandon de chantier ; 

    • étudier le contrat et en déduire la responsabilité de l’entreprise ;

    • constituer un dossier probatoire solide ;

    • évaluer le préjudice et les recours envisageables ;

    • engager les procédures amiables ou judiciaires ;

    • mobiliser les assurances applicables.

 

Bien que déroutant, l’abandon de chantier n’est pas une fatalité. Avec une réaction rapide, des démarches bien suivies et l’appui d’un avocat, il est possible de faire valoir vos droits, maîtriser vos coûts et redonner vie à votre projet.

Parce qu’aucun dossier ne se ressemble, le cabinet AKP vous propose un accompagnement sur mesure : audit de votre contrat et des assurances mobilisables, constitution d’un dossier probatoire solide, choix de la procédure la plus adaptée et négociation d’indemnisations auprès de l’entreprise défaillante ou de son assurance.

Grâce à cette stratégie proactive, vous sécurisez votre budget, réduisez les délais d’achèvement et préservez la valeur de votre patrimoine immobilier.

Vous êtes confronté à un chantier à l’arrêt ? Ne laissez pas la situation s’enliser : contactez dès maintenant le cabinet d’avocat AKP pour un diagnostic personnalisé.

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